Le soin rituel rebozo célèbre les femmes
- Nathalie Rigoulet

- il y a 6 jours
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Ce rituel de passage issu de pratiques traditionnelles mexicaines accompagne la femme dans ses différentes étapes de vie. Un soin pour se recentrer, se ressourcer, se libérer, s’ouvrir à de nouveaux possibles...
Le rebozo est une étole en tissu à franges caractéristique de la culture mexicaine qui est au centre des soins rituels. « Rebozo », qui est dérivé du verbe « rebozar » en espagnol signifie couvrir, emmitoufler. Comprendre le soin rebozo passe forcément par saisir ce que représente ce foulard dans la culture mexicaine. Le rebozo traditionnel est tissé à la main à partir de fibres de coton, de laine ou plus récemment de rayonne ou de soie, il allie élasticité et robustesse. Originellement, les motifs et les couleurs indiquaient la lignée, le groupe ou le village de la femme qui le portait et le degré de complexité du tissage indiquait le statut social ou la situation économique. Les franges caractéristiques du rebozo, tissées au doigt sont appelées « rapacejos »1. Dans le magazine Spirale, « la grande aventure du bébé »2, la doula Alexandra Doyon, accompagne et soutient la future mère et son entourage pendant la grossesse, l’accouchement et la période postnatale, en complément du suivi médical choisi par les parents (hôpital, clinique, sage-femme libérale…). Elle évoque le Mexique comme le probable pays d’origine de cette tradition de tissage qui aurait ensuite essaimée vers l’Amérique Centrale. Si les grandes villes ont peu à peu abandonné cet usage campagnard, les zones rurales ont continué de perpétuer son enseignement et ses applications grâce aux grands-mères, doulas et sages-femmes traditionnelles. Cette étoffe fait partie de l’identité mexicaine, une grande majorité de femmes en possède au moins une. Le Mexique est le plus grand fabriquant et exportateur de rebozos mais l’Espagne et le Portugal en fabriquent également, à moindre mesure. Le rebozo est utilisé pour porter des charges, comme pare soleil ou pour se protéger du froid, les femmes le portent aussi durant la grossesse pour soulager le poids du ventre, le dénouent pour accoucher, s’en enveloppent, s’en servent pour couvrir ou porter leur bébé. Le rebozo reste un véritable symbole d’identité nationale, un accessoire de mode indispensable du vestiaire féminin au Mexique. La mode contemporaine se veut le porte-parole de cette tradition vestimentaire joliment mise en lumière par des femmes médiatiques à l’image de la chanteuse et artiste Lila Downs qui représente la femme mexicaine moderne toujours très attachée à son identité. Frida Khalo en son temps portait toujours un rebozo.
Du tissu au soin rituel
Laurence Kerbarh3enseigne et pratique le Rebozo depuis plus de 15 ans, elle a bien voulu nous éclairer sur cette pratique. « J’ai découvert le Rebozo grâce à une initiation faite par une amie au Mexique, j’ai ensuite suivi une formation auprès d’une sage-femme mexicaine qui combine les pratiques traditionnelles mexicaines et les pratiques contemporaines d'accouchement à domicile, Naoli Vinaver4, elle enseigne et propose des séminaires dans plus de 30 pays à travers le Monde. Vivre ce soin immergée en terre mexicaine fut une révélation, un coup de foudre. Historiquement le soin Rebozo est un soin du post-partum, offert pour honorer la femme qui a donné la vie, la célébrer et la remercier du temps qu’elle a accordé à sa grossesse. Il y a une dimension spirituelle au Mexique, mais de tout temps les femmes ont pris soin des femmes au moment de la naissance. Des pratiques de soutien du post-partum on en retrouve dans d’autres pays, sous d’autres formes par exemple au Maroc et en Algérie. En France, avec le temps, ces soins se sont éteints, perdus. Le soin rituel rebozo existe toujours dans certaines régions rurales du Mexique, et il s’est exporté en Europe et en Amérique du nord ».
Comment se déroule le soin rituel rebozo ?
Originellement offert aux femmes après l’accouchement, ritualisant et célébrant ainsi le passage significatif de femme à mère, ce soin s’adresse aujourd’hui à toutes les femmes qui vivent une étape de leur vie : naissance, rupture, deuil, mariage, ménopause, changements professionnels, etc. mais également celles qui souhaitent s’offrir un temps pour soi, se recentrer, se ressourcer, se retrouver, prendre du recul...La femme qui est accueillie pose une intention pour ce soin, elle est ensuite accompagnée tout au long du soin par deux praticiennes femmes. Laurence Kerbarh précise : « Ce soin de deux femmes pour une femme permet une qualité d’écoute, d’accueil, de bienveillance, de douceur, de sororité qui vient contenir, entourer et reconnaître la femme ».
Le soin rituel dure environ 3h. Une fois l’intention du soin posé et accueilli par les praticiennes, se déroule « un massage à 4 mains qui favorise un relâchement profond, il permet de lâcher prise car le cerveau ne peut pas suivre les 4 mains en même temps. Ensuite c’est le temps du hammam aux plantes, la femme immergée dans une chaleur très archaïque que l’on pourrait qualifiée d’utérine est bercée par les effluves de plantes et la vibration du tambour que nous jouons. C’est un temps d’apaisement, de détente physique, de repos, de relâchement, de nettoyage et d’introspection. Le soin se poursuit par un temps d’enveloppement. Le corps est emmaillotté, contenu, serré fort en sept points clés du corps (tête, épaules, ventre, bassin, cuisses, genoux, pieds) comme dans un cocon, la sensation est plus ou moins agréable. Un soin rituel n’est pas forcément confortable, ce n’est pas de la thalasso pour se faire du bien. Une tisane à base de cannelle et de romarin qui participe à la montée en chaleur du corps accompagne chaque étape du soin rebozo ».
Chaque soin rituel est unique et chaque femme vit sa propre expérience du soin. Le rituel rebozo a une action à la fois au niveau physique, mental, émotionnel, spirituel et énergétique.
Le rebozo peut-il être utilisé en dehors du cadre du soin rituel ?
Le rebozo est un magnifique médiateur pour de nombreux professionnels. Sages-femmes, praticiens.nes de bien-être, doulas, ostéopathes, kinésithérapeutes, masseurs.euses trouvent dans les techniques de bercements, étirements, serrages, suspension…avec le rebozo, un fabuleux et délicat outil pendant la période périnatale pour, par exemple, mobiliser le bassin, au fil de la grossesse pour bercer le ventre ou soutenir le ventre qui s’arrondit, en post-partum pour bercer le bébé, resserrer le bassin. Laurence Kerbarh qui propose plusieurs formations au sein de son école évoque également des « techniques de bercement de la tête, des épaules, du bassin, de serrage sur chaise, sur ballon, au sol...Le rebozo offre aussi une possibilité de toucher la personne sans la toucher directement, cette pratique est un médiateur de choix avec les personnes atteintes de handicap (ex : personnes autistes) et également très appréciée dans une approche de soins aux personnes âgées ».
Quels sont les bienfaits de l’utilisation du rebozo ?
Pendant la grossesse, l’augmentation de sécrétion de l’hormone relaxine assure une distension de tous les ligaments, dont ceux du pelvis et de la symphyse pubienne. Le rebozo, bien installé et bien serré, réduit la pression sur le périnée, soulage les douleurs ligamentaires et aide à maintenir en place les articulations du bassin. En fin de grossesse, le poids du ventre peut devenir très inconfortable aussi, un rebozo qui enveloppe tout le ventre avec un nouage dans le dos ou sur le côté apporte un soulagement immédiat5. Le rebozo est également très utile pendant l’accouchement. « Suspensions et bercements libèrent le sacrum, facilitent la respiration, contribuent à diminuer les tensions lombaires, favorisent l’engagement et la dilatation du col, ainsi que la sécrétion des endorphines. Enfin, en postpartum immédiat, lerebozo est utilisé pour pratiquer le serrage du bassin avant les levers de la nouvelle mère, protégeant ainsi le périnée et soutenant les organes internes, alors que les muscles abdominaux, les ligaments utéro-sacrés et le périnée sont encore lâches »6. Porter son enfant avec le rebozo maintient un contact peau à peau et facilite le lien, un bienfait chaque jour renouvelé...

Se laisser aller, tout simplement
Au-delà des bienfaits purement physiques, les techniques proposées par les praticiens.nes de rebozo permettent aux personnes accueillies de se détendre, se relaxer, de lâcher les tensions, se recentrer en prenant conscience de son corps, de lâcher prise, de laisser libre cours à ses émotions, d’évacuer le stress et de recevoir avec bienveillance toutes les sensations et pensées.
Recevoir un soin et/ou se former ?
Il suffit de taper sur internet pour se rendre compte du choix de formations qui inondent la toile ! Impossible vu d’ici de savoir ce qu’elles valent, une histoire sans fin lorsqu’on parle de pratiques ou techniques pas ou très peu explorées scientifiquement. Une chose est sûre, il est plus sage de choisir une formation où les formateurs ont eux-mêmes reçus une formation solide. Vous êtes en droit de demander des détails et de vous renseigner avant de vous engager. Sur le site de Laurence Kerbarh vous trouverez à la fois des propositions de Formations et le nom de thérapeutes dans votre région si vous souhaitez recevoir un soin.https://ecolefrancaisedurebozo.fr/#FORMATION
Idée lecture : Virginie Mandin Derobe « Le rebozo ; bien l’utiliser au quotidien et dans sa vie professionnelle », édition Myriadis, 2014.
1https://fr.wikipedia.org/wiki/Rebozo
2A. Doyon, « Le Rebozo, témoin des passages de la vie d’une femme », Spirale, n° 86, 2018.
3https://ecolefrancaisedurebozo.fr
4https://www.naoli-vinaver.com/fr
6A. Doyon, « Le Rebozo, témoin des passages de la vie d’une femme », Spirale, n° 86, 2018.








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